Anja Stiegler - Galery
Que valent l’anecdotique, les évènements accessoires, l’inessentiel, dans une classe ?
Pas grand chose. Au mieux - de bons souvenirs. Au pire - une heure de colle.
L’enseignant veille à effacer tout ce qui ne tient pas lieu de sérieux : il n’a que faire d’une mine qui se casse dans un taille crayon.. Tout fait non rattaché à l’exercice lui-même est exclus de l’éducatif, gommé.
Tout semble marcher ainsi :
Vous voulez avoir le ventre plat ?
Hé bien, rentrez le ventre !
Vous désirez apprendre ?
Hé bien, concentrez-vous sur l’exercice !
En adhésion totale, la personne de l’élève doit s’intégrer tout entier au sein du problème donné. Afin de s’engager à penser, ‘l’apprenant’ doit rejeter toute forme de distraction. Même le règlement élaboré avec les élèves à la rentrée des classes a banni le « droit de rêver » de la colonne : « je peux ».
Pourtant, la réflexion se forge-t-elle uniquement dans la constance du sérieux, du froid apprentissage, de la sobriété dénuée de variation ? La découverte de concepts nouveaux requiert-elle de suivre les sentiers rebattus ?
Rien n’est moins sûr. Ecoutons Cédric Villani :
Poincaré fait une découverte en se promenant sur une falaise. Nietzsche pense en marchant. Et si la Sérendipité* joue un rôle dans la science, ce n’est pas qu’une question de hasard, ni de « savoir tirer partie de trouvailles fortuites ». Ca va plus loin que ça.
Créer de la pensée suppose de sauter d’un concept à l’autre en passant par le filtre coloré du « non classique », disons-le de garder un œil flottant sur l’irréel, une oreille sur l’imaginaire, un neurone sur le rêve. Sortir de la rigidité habituelle, suppose d’importer la couleur mystérieuse de la poésie, d’un peuplier admiré par la fenêtre au centre de sa copie.
Bref, s’élever hors de l’immobilisme, s’évader du fade, s’extraire d’une représentation ordinaire, c’est en quelque sorte « oser le loufoque ».
« pour inventer, il faut penser à côté. » n’hésitait pas à affirmer Souriau, dans sa Théorie de l’invention.
Se laisser envahir par le rêve pour atteindre la profondeur.
Cinquante nuances de vagabondages offrent ainsi des voies vertigineuses d’interprétations, des bifurcations possibles, pléthores de confusions où l’on se perd, pour trouver, se retrouver.
S’élever - ailleurs - permet d’échapper aux servitudes – d’ici. Parcourir des formes inattendues permet l’inspiration. D’accéder à une vision.
L’escapade intellectuelle, la contemplation et la déconcentration passagère ne sont pas ennemies des savoirs mais des partenaires intellectuels
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De la sérendipité, dans la science, la technique, l’art et le droit – Leçons de l’inattendu – Pek van Andel, Danièle Bourcier – L’Act Mem, Libres sciences, Paris, 2009, isbn : 978-2-35513-018-2
* P 7 : La sérendipité est le don de faire des trouvailles ou la faculté de découvrir, d’inventer ou de créer ce qui n’était pas recherché dans la science, la technique, l’art, la politique et la vie quotidienne, grâce à une observation surprenante. »
… D’autant que dans une société de plus en plus moderne, où la rationalité et la réflexivité tiennent une place croissante, la place et le rôle du hasard méritent un surcroît d’intérêt.
François Ascher – université Paris 8.
P 12 : En pratique une vraie découverte, invention, création est toujours la combinaison d’un élément étonnant et d’une vérification pertinente.
La recherche systématique et la sérendipité ne s’excluent pas, au contraire elles se complètent et même se renforcent. Dans la recherche et en général dans l’action, il faut planifier. Mais un plan n’est jamais sacré : des milliers d’évènements inattendus ou d’effets non anticipés interviennent dans le cours d’une expérience ou d’un projet, dont un bon chercheur doit savoir se servir.
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Mais assez de verbiages, place à l'humour vacances :
Les petits souvenirs... "Les petits moments de joie" ou "fausses joie de l''extrême" - cadeau de Noël du Chêne - versus :
L'enfer du futur. La ludification : au pire, rien d'impossible. ("Double-cliquez" afin d'atteindre la vidéo)