L’Art serait-il une reproduction ? Une idée ? Une combinaison de couleurs ? Une imitation ? Une abstraction ? Une œuvre originale issue d’un être singulier ?
Nous le voyons, nous avons beau penser de l’Art - gratter à sang notre questionnement épidermique - nous nous agaçons d’entendre des définitions aussi parcellaires qu’insatisfaisantes.
Heureusement, des acrobates de la pensée – plus virtuoses que d’autres, faut croire - pénètrent dans l’arène des idées et parviennent à mettre un peu d’ordre dans ce cirque de propositions. L’équilibriste es art, Jacqueline Lichtenstein 1* par exemple, mais également le philosophe Régis Debray dont la pensée de haute voltige fait le régal de tout questionneur émerveillé. A nous de saisir le trapèze original lancé à travers l’espace des conventions à géométrie plate. Que nous dit-il ? « L’art, c’est du beau fait exprès »*2.
La proposition interpelle.
Du fait exprès – l’objection de la photographie étant balayée par l’intentionnalité de la prise de vue -, la chose est entendue. Quant au beau, naturellement, il s’agit ici de la catégorie kantienne du beau… d’une « finalité sans fin », celle procurant une « satisfaction désintéressée ». Car évidemment, en matière d’art contemporain la laideur rivalisant de médiocrité -, retenir ce critère aurait pu paraître contestable. C’est pour cette ambiguïté de la langue que nous l’écarterons.
« Du fait exprès »… Bien. Retenons. Mais dans quel but ? Pour quoi faire ? … Montrer… Offrir ?...
Oui, c’est cela… Donner.
« Du fait exprès pour donner à voir » L’idée semble étrange. Pourtant sa proximité avec le « donner à penser » philosophique n’est pas inintéressante.
L’Art – avec grand A, SVP – ne serait-il pas, en effet, ce qui ajoute, accroît, augmente ?
Pour preuve, piquons au fil du hasard deux exemples, celui d’une barre de béton d’un côté et de l’autre celui d’une œuvre de Sonia Delaunay. Comparons. L’essentiel distinguant les deux œuvres ne réside-t-il pas justement dans l’expression de chacune ? Autrement dit, dans le contenu de leurs propositions ?
Face à l’évidence – une fois n’est pas coutume - nul besoin de réfléchir ad vitam aeternam. Constat : la première ne représente qu’elle-même, proposition certes solide, mais quelque peu – avouons-le - monolithique et lourde. La seconde est couleurs, formes, profondeur, semble donc douée quant à elle, d’angles de vue à géométries multiples. Nous entrons là dans le monde courbe de la physique des multitudes … : une sorte d’univers hyper-dimensionnel.
Nous le voyons, tout comme l’infime translation de sens provoque l’écart qui interpelle, du regard en biais émerge la pensée qui arrête.
Aussi, de la même manière, en s’exprimant sur les photographies atypiques de Gilbert Garcin, le physicien Etienne Klein, donne-t-il à voir une matière qui nous échappe… Plus qu’une interprétation décalée, la densité des savoirs propres au monde de la physique apporte une vision* étonnante. Un éclairage détonant… Un autre langage, un ajout, un enrichissement, en ce qu’une lecture ordinaire – la nôtre, c’est-à-dire exempte de paramètres scientifiques – en est incapable et donc, face aux photomontages demeure muette.
L’artiste serait-il alors un traducteur de monde ?
De la lecture infinie d’un paysage, en tout cas, surgit l’intérêt du flâneur.
Petite balade, donc, en langue des sciences…
De Gilbert Garcin à la physique des multitudes, entretien avec Etienne Klein.
Physique des multitudes Etienne Klein 25-10-15 - Photo Virginie Le Chêne parlant En collaboration avec le Magazine Slow Classes L'Art serait-il une reproduction ? Une idée ? Une combinaison de ...
http://lecheneparlant.blogspot.fr/2016/09/de-gilbert-garcin-la-physique-des.html
Article entier avec photos de Gilbert Garcin et transcription complète de l'entretien.
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